Le prêt garanti par l’État souffle sa première bougie
Le prêt garanti par l’État (PGE) a un an. Confinement oblige, le PGE ne pourra pas organiser de goûter d’anniversaire au Quick, mais ses parents (les banques et le gouvernement) ont de quoi être contents. Mis en place le 23 mars 2020, le PGE a depuis permis à 660 000 entreprises (dont 34 000 PME) d’emprunter la bagatelle de 135 milliards d’euros pour soutenir leur trésorerie. Chiffre notable : 80 % des 660 000 PGE accordés aux entreprises leur ont été octroyés entre fin mars et fin juin 2020, c’est-à-dire durant les trois premiers mois d’existence du PGE. En termes plus mathématiques, la courbe des octrois de PGE dans le temps ressemble fort à celle de la fonction logarithme népérien — une courbe qui monte vite au début avant de s’aplatir progressivement. Coïncidence ? Pas vraiment. Si la courbe des octrois de PGE suit celle du logarithme népérien, c’est sans doute parce que les dirigeants qui obtiennent un prêt garanti par l’État… ne paient rien (désolé) avant le premier anniversaire de leur PGE — à l’exception des intérêts du prêt. La banque qui accorde un PGE à une entreprise s’assoit sur le paiement des mensualités de remboursement qui lui sont dues pendant douze mois (au moins). C’est elle aussi qui paie les intérêts de la garantie de l’État pour le compte des entreprises emprunteuses durant la première année du PGE, car l’État n’accorde pas sa garantie gratuitement.
Il y a un an, au moment de la mise en place du prêt garanti par l’État, le premier anniversaire de ce dernier semblait loin, très loin, trop loin pour que les dirigeants commencent à se préoccuper de son remboursement. À leur décharge, les chefs d’entreprise avaient alors d’autres priorités, comme par exemple : survivre au premier confinement. Aujourd’hui, un an plus tard, le PGE souffle sa première bougie et les dirigeants doivent faire un choix. Ils peuvent : soit rembourser l’intégralité de leur PGE de suite, soit étaler leur remboursement sur un à cinq ans, soit demander un an de répit supplémentaire sans remboursement avant d’étaler leurs mensualités sur un à quatre ans. Quand les banquiers appellent les chefs d’entreprise à qui ils ont accordé un PGE pour leur demander « quand prévoyez-vous de rembourser votre prêt ? », il semblerait que beaucoup de dirigeants répondent « reparlons-en dans un an merci au revoir ». C’est en tout cas ce que semble indiquer Solenne Lepage, la directrice générale adjointe de la Fédération bancaire française (FBF), dans un récent entretien avec le Journal des entreprises. D’après elle, une « proportion significative » des chefs d’entreprise ont opté pour le différé de remboursement, option qui leur est proposée depuis le 14 janvier dernier, et que les banques se sont engagées à accepter systématiquement. Si le deuxième anniversaire de la mise en place du PGE semble encore loin, très loin, les entreprises qui demandent un différé d’un an supplémentaire comptent sans doute sur une reprise estivale pour se refaire la cerise avant de commencer à rembourser leur PGE au printemps 2022.
Méfiez-vous de la fraude au président
Imaginez que vous occupez le poste de directeur financier d’une PME. Vous recevez un e-mail expédié depuis une adresse exotique qui dit en gros : « Merci de virer plusieurs millions sur ce compte bancaire domicilié dans un pays fort fort lointain et dont vous n’avez jamais entendu parler. Cordialement. » En tant que DAF, que faites-vous ? Réponse : vous ne faites rien. Vous ne virez pas le moindre centime à qui que ce soit. Fleurant l’arnaque, vous vous contentez de signaler l’e-mail frauduleux que vous venez de recevoir. Maintenant, imaginez que vous recevez un e-mail expédié depuis une adresse qui ressemble vraiment beaucoup à celle de votre patron et qui dit cette fois : « Bonjour, c’est moi, le patron de la PME pour laquelle vous travaillez, je suis coincé dans un rendez-vous important à la Banque de France, mais j’ai besoin que vous fassiez un virement urgent pour moi sur ce compte en banque tout à fait respectable. Je compte sur vous. » En tant que DAF, que faites-vous ? Vous hésitez un peu, non ? Cette fois, l’e-mail ne semble pas frauduleux. Les informations qu’il contient sont même tout à fait exactes. Votre patron vous avait bel et bien dit qu’il avait un rendez-vous à l’extérieur aujourd’hui. Tout concorde. Et puis, comment les fraudeurs auraient-ils pu deviner que votre chef avait rendez-vous à la Banque de France de toute façon ? Allons… C’est impossible. L’e-mail vient donc forcément de votre patron. C’est presque sûr. Vous ne voyez pas de raison de vous méfier plus que ça cette fois. Comme vous n’êtes pas du genre à désobéir à votre patron, et comme ce dernier vous a demandé d’agir vite, vous procédez au virement, vous envoyez les fonds sur le compte indiqué dans l’e-mail.
Mission accomplie, non ? Non, malheureusement. Enfin si, mais pas pour vous. La mission est accomplie pour les pirates à qui vous venez de faire un virement. Cette fois, les pirates sont parvenus à tromper votre vigilance. Comment s’y sont-ils pris ? Ils ont patiemment enquêté sur votre entreprise, ce qui leur a permis d’accéder à l’emploi du temps de votre patron et de trouver votre adresse e-mail professionnelle. Forts de ces renseignements, ils ont ensuite créé une adresse e-mail qui ressemble à celle de votre patron, puis ils ont mis sur pied un scénario crédible vous mettant sous pression pour vous obliger à virer de l’argent sur un compte inconnu — qui est en fait le leur. On appelle ça la fraude au président. Vous pensez obéir aux consignes de votre patron, mais vous obéissez en fait à des pirates. Le pire dans tout ça ? Comme vous avez délibérément procédé au virement frauduleux, comme votre compte en banque n’a pas été piraté de l’extérieur, votre banque peut refuser de vous aider, au motif que vous étiez censé savoir ce que vous faisiez. Vous vous dites qu’il faut être particulièrement naïf pour tomber dans le panneau ? Parlez-en à l’ancien directeur financier du groupe de cinémas Pathé, qui a viré 19,2 millions d’euros sur un compte inconnu, en pensant financer une acquisition à Dubaï pour le compte de son entreprise. Les fraudes au président n’arrivent pas qu’aux autres. D’après le magazine The Conversation, les pirates auraient détourné plus de 26 milliards de dollars de cette manière depuis 2013. Comment se prémunir contre la fraude au président ? En ouvrant l’œil. Vérifiez systématiquement l’adresse d’expédition des e-mails que vous recevez. Vous pouvez aussi mettre en place une procédure de validation à plusieurs mains pour les virements qui dépassent un certain montant. Et si vous avez rendez-vous à la Banque de France, évitez d’en parler sur LinkedIn…
P.-S. Avec Memo Bank, c’est vous qui décidez qui, parmi vos collaborateurs, peut faire des virements pour le compte de votre entreprise. Vous pouvez par exemple permettre à votre secrétaire de préparer des demandes de virements, c’est-à-dire des virements qui restent à l’état de brouillon tant que vous ne les avez pas validés, et qui ne sont exécutés qu’après votre validation. Pour plus de sécurité, vous pouvez aussi fixer des plafonds de virements, des montants à ne pas dépasser.