De l’air pour les PME qui ont bénéficié d’un PGE
Les entreprises qui ont demandé un prêt garanti par l’État (PGE) à leur banque viennent d’obtenir un an de répit supplémentaire. Jusque là, quand une société obtenait un PGE auprès de sa banque, elle n’était pas tenue de le rembourser durant la première année — on appelle ça une « franchise de remboursement ». Dit autrement, l’entreprise payait uniquement les intérêts du PGE pendant les douze premiers mois du prêt ; elle était dispensée de rembourser le capital (le gros du prêt) avant le premier anniversaire de son emprunt. Depuis l’annonce du ministre de l’Économie, vendredi dernier, la franchise de remboursement accordée par les banques aux entreprises peut aller jusqu’à deux ans. Concrètement, une PME qui a souscrit à un PGE en mars 2020 pourra, si elle le souhaite, reporter le début de son remboursement jusqu’en mars 2022. Comme la durée des PGE ne peut excéder 6 ans, les entreprises qui demanderont une deuxième année de franchise de remboursement n’auront ensuite « que » 4 ans (au plus) pour rembourser l’intégralité de leur crédit. Si le ministère recommande aux entreprises de prendre rendez-vous avec leur banquier pour demander un an de différé supplémentaire, les banques ont d’ores et déjà fait savoir qu’elles accepteraient systématiquement les demandes de report — pour s’épargner une réunion qui pourrait être remplacée par un e-mail, peut-être ?
Pour rappel : le gouvernement a lancé le prêt garanti par l’État en mars 2020, avec le soutien de Bpifrance, dans le but de mettre en place « un pont aérien de cash » vers les entreprises. Il s’agissait, à l’époque, d’apporter de l’argent frais aux sociétés dont le chiffre d’affaires était alors en chute libre à cause du confinement, d’où l’idée de ne pas leur demander de remboursement durant la première année du prêt. Comme les PGE sont des crédits accordés par les banques aux entreprises, et non pas par l’État directement, l’État garantit jusqu’à 90 % des sommes prêtées dans le cadre du PGE, ce qui incite les banques à jouer le jeu — car elles ne sont exposées « que » sur 10 % des montants qu’elles octroient. À ce jour, les banques ont accordé plus de 640 000 PGE, pour un total de 130 milliards d’euros, dont 7 % pourraient ne jamais être remboursés. Parmi les entreprises qui ont bénéficié d’un PGE, la plupart (88 %) ont moins de 10 employés. Les PME ne représentent que 5 % des bénéficiaires du PGE, mais elles captent 34 % des montants accordés dans le cadre du PGE. À l’instar des pièces de théâtre à succès, que les directeurs de théâtre prolongent pour que le public puisse en profiter plus longtemps, le PGE a été reconduit jusqu’au 30 juin 2021. Les banques peuvent donc le proposer à leurs clients jusqu’à cet été.
Les Français aiment les PME
Le journal Le Monde a publié cette semaine les conclusions d’une étude réalisée par l’institut de sondage Ipsos auprès de 1 000 Français (voir l’étude complète). Interrogés sur les priorités que le gouvernement devrait se donner dans le cadre du plan de relance (100 milliards d’investissement), la moitié des sondés ont estimé que l’aide aux PME devrait être une priorité du gouvernement. Les Français consultés ont aussi cité la réforme de la santé et l’amélioration de la situation des jeunes, mais moins souvent que le soutien aux PME, ce qui fait de l’aide aux PME la priorité la plus… prioritaire… aux yeux des Français. Comment interpréter ce résultat ? Si ce n’est pas une déclaration d’amour à destination des PME, ça y ressemble beaucoup. Alors qu’Amazon vient de passer le million d’employés, les Français donnent la priorité aux PME, c’est-à-dire aux entreprises qui emploient moins de 250 personnes.
Faut-il y voir une méfiance envers le gigantisme ? Un penchant pour la décentralisation ? Un rejet de la démesure ? Difficile à dire. Il faudrait interroger un économiste. Si les PME sont toutes différentes les unes des autres, il est probable que l’idée que les Français s’en font diffère elle aussi d’une personne à une autre, ce qui complique les tentatives de généralisation en matière de PME. Après tout, quels points communs y a-t-il entre une librairie indépendante qui se bat contre Amazon et une PME technologique qui fabrique des composants pour équiper les robots d’Amazon ? Une tendance commence cependant se dessiner : en faisant des PME leur priorité, les Français semblent privilégier la proximité, les entreprises « du coin », celles qui font passer les « personnes » avant la « structure », celles qui payent leurs impôts en France aussi. Est-ce que ces bonnes intentions affichées par les Français se traduiront par un soutien financier aux PME et aux producteurs locaux ? À voir.