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Les défaillances de PME repartent à la hausse

Hadrien Léger

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14 octobre 2022

La newsletter Memo Bank du 14 octobre 2022.

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À lire

La hausse des défaillances d’entreprises touche surtout les PME

Le cabinet Altares publie chaque trimestre une étude qui fait le point sur les défaillances d’entreprises et les procédures de sauvegarde. L’étude qui porte sur le troisième trimestre de l’année 2022 vient de sortir. Avant de nous plonger dans l’étude d’Altares, explorons ce que l’on entend par entreprises « en défaillance » et « en sauvegarde » — sujets que nous évoquons régulièrement.

Les entreprises en défaillance ou en sauvegarde sont des entreprises qui se retrouvent sous contrôle judiciaire en raison de difficultés financières. À la demande de l’entreprise elle-même, ou de ses créanciers, le tribunal de commerce ouvre une « procédure collective ». L’objectif de la procédure collective est de maintenir l’activité de l’entreprise, tout en préservant l’intérêt de ses créanciers. Pendant la procédure collective, les dettes de l’entreprise sont gelées (ce qui lui permet de reconstituer sa trésorerie) et les créanciers ne peuvent agir individuellement pour recouvrer leurs créances. Leurs dettes sont gérées de manière collective — d’où le terme de procédure collective. Il existe trois types de procédures collectives : la procédure de sauvegarde (1), la procédure de redressement judiciaire (2), et la procédure de liquidation judiciaire (3). Le terme d’entreprise défaillante concerne uniquement les entreprises qui se retrouvent en situation de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.

La procédure de sauvegarde (1) concerne les entreprises qui ne sont pas encore en cessation de paiement. C’est-à-dire qui ne sont pas encore dans l’incapacité de faire face à leurs obligations financières — payer leurs fournisseurs, leurs salaires, leurs mensualités de crédit… Malgré tout, le dirigeant considère que sa société est suffisamment en difficulté pour avoir besoin de l’aide du tribunal de commerce. Après une période d’observation, le tribunal propose à l’entreprise un « plan de sauvegarde », qui comprend notamment un étalement du remboursement des dettes de la société. Le dirigeant de l’entreprise garde une certaine autonomie vis-à-vis du tribunal dans la gestion de son activité.

La procédure de redressement judiciaire (2) s’adresse aux entreprises en cessation de paiement — le dirigeant doit d’ailleurs obligatoirement la demander dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements. Après une période d’observation, pendant laquelle le tribunal peut ordonner la cessation de l’activité, le tribunal impose un plan de redressement. Le tribunal a davantage de pouvoir que dans la procédure de sauvegarde : il peut remplacer un ou plusieurs dirigeants, fixer leur rémunération, contrôler les licenciements éventuels…

Enfin, la procédure de liquidation judiciaire (3) est déclenchée lorsque le tribunal de commerce juge que l’entreprise n’est plus en mesure de remonter la pente, et de rembourser ses créanciers. Le dirigeant est dessaisi de ses fonctions, les salariés sont licenciés, et le tribunal nomme un liquidateur judiciaire chargé de vendre les actifs de l’entreprise.

Les journalistes et les auteurs des études Altares assimilent souvent toutes les entreprises en procédure collective à des entreprises « en défaillance », même si la défaillance ne concerne en théorie que les entreprises en redressement judiciaire (2) ou en liquidation judiciaire (3) — et pas les entreprises en sauvegarde (1). Cet abus de langage se justifie par la part minime des procédures de sauvegarde dans le nombre des entreprises en difficulté — entre 1,5 et 3 % selon les trimestres.

Que dit la dernière étude d’Altares ? Le cabinet constate que le nombre d’entreprises en procédure collective a augmenté de 68,5 % par rapport au troisième trimestre de 2021. Une telle hausse d’année en année n’avait pas été observée depuis 25 ans. Au total, sur les 12 derniers mois (du 1er octobre 2021 au 30 septembre 2022), 38 000 entreprises se sont retrouvées en sauvegarde ou en défaillance. Depuis septembre 2020, c’est la première fois que la barre des 38 000 est atteinte sur 12 mois glissés.

Autre signal inquiétant : si la majorité des procédures collectives (75 %) concernent comme toujours des TPE de moins de 3 salariés, de plus en plus de PME sont touchées. En particulier les PME qui comptent moins de 50 salariés. Sur la tranche de 10 à 19 salariés, la part d’entreprises en difficulté a augmenté de 77 % ; sur la tranche de 20 à 49 salariés, l’augmentation est de 111 %. L’augmentation du nombre et de la taille des entreprises défaillantes se répercute sur les emplois menacés (les emplois qui disparaîtraient si toutes les entreprises en difficulté faisaient faillite) : on passe de 17 460 emplois menacés au troisième trimestre 2021, à 32 970 emplois menacés au troisième trimestre 2022.

Quels sont les secteurs les plus touchés par la hausse des défaillances ? On retrouve d’abord des secteurs des services : hôtellerie-restauration, commerce de détail, e-commerce, salons de coiffure et instituts de beauté… Ces entreprises sont touchées par la fin des aides, par le remboursement du prêt garanti par l’État (PGE), et par l’inflation qui entame le pouvoir d’achat des ménages. Dans l’hôtellerie-restauration, une entreprise sur 4 affirmait fin juin n’être pas en capacité de rembourser son PGE. Autre secteur durement touché : la boulangerie-pâtisserie, avec une augmentation de 128 % des défaillances, et un nombre de défaillances qui représente 80 % des défaillances de toute l’industrie alimentaire.

En réalité, l’étude d’Altares pointe une évolution inquiétante, plus qu’un état des lieux inquiétant. Si le nombre de défaillances augmente, il reste encore très inférieur aux niveaux de défaillances qui étaient la norme avant la crise sanitaire. Altares estime qu’en 2022, le nombre de défaillances et de procédures de sauvegarde concernera 40 000 entreprises, un chiffre à comparer aux 52 000 cas de 2019 et aux 54 000 de 2018.

C’est finalement surtout 2023, et ses prévisions macroéconomiques moroses, qui inquiète. La Banque de France envisageait dans ses projections économiques de septembre dernier que la France pourrait être en récession en 2023 — elle prévoyait que la croissance du PIB français serait comprise dans une fourchette large, entre -0,5 % et 0,8 %. Une incertitude due aux évolutions imprévisibles de la guerre en Ukraine et de la crise énergétique. L’inflation, bien que contenue, agit négativement sur la demande de consommation, et la crise énergétique fait flamber les factures des usines, gourmandes en électricité et en gaz, ce qui pourrait provoquer une vague de défaillances dans l’industrie. Selon Altares, la tendance à la hausse des défaillances devrait donc se poursuivre en 2023, et pourrait même dépasser le niveau de 2019.

Les pays européens n’affrontent pas la crise énergétique de front

Nous évoquions la semaine dernière la crise énergétique qui frappe l’Europe, et les mesures que mettent en place les gouvernements européens pour éviter des pénuries et un appauvrissement de leurs économies. Problème : les États européens ont du mal à s’entendre sur des solutions communes, tant leurs priorités et leurs intérêts divergent.

Quelques mesures ont néanmoins recueilli l’assentiment des 27. Le 30 septembre dernier, les ministres de l’Énergie européens se sont accordés sur la mise en place d’une taxe sur les « super profits » des fournisseurs d’énergie nucléaire et renouvelable — qui ont bénéficié de l’envolée du prix de l’électricité, alors que leurs coûts de production sont restés stables. Pendant cette même réunion, les ministres européens se sont entendus sur deux objectifs chiffrés de sobriété énergétique. D’abord, un objectif obligatoire : les États européens devront réduire leur consommation d’électricité de 5 % pendant les heures de pointe, entre le 1er décembre et le 31 mars 2023. Ensuite, un objectif indicatif : les États s’efforceront de réduire de 10 % leur consommation d’électricité d’ici 2024.

Les ministres européens n’ont en revanche pas trouvé d’accord sur une mesure que 15 pays sur 27 considèrent comme essentielle pour réduire le coût de l’énergie : le plafonnement des prix de gros du gaz. C’est-à-dire la détermination d’un prix maximum auquel les pays européens achètent du gaz aux producteurs. S’il y a un consensus sur l’application de ce plafonnement à la Russie, la Commission européenne et l’Allemagne se refusent à l’appliquer à tous les fournisseurs. Ils craignent que cette limitation des prix ne menace l’approvisionnement de l’Europe en gaz, la demande mondiale étant suffisamment forte pour que des producteurs de gaz (mêmes alliés), comme la Norvège et les États-Unis, ne se tournent vers d’autres destinations.

La Norvège est au cœur des débats : l’État nordique est devenu le premier fournisseur de gaz du continent, à la place de la Russie. Les revenus gaziers de la Norvège devraient être de 193 milliards d’euros en 2022, contre 22,4 milliards en 2019, et 34,4 milliards en 2019 — années qui précédaient la crise sanitaire. Lors de la première réunion de la Communauté politique européenne à Prague, le 7 octobre dernier, la Norvège a annoncé vouloir s’engager pour réduire les prix du gaz de façon significative. Une simple déclaration d’intention, qui reste vague, selon Les Échos.

Autre source de tension sur la scène européenne : l’über-plan de l’Allemagne pour redresser son économie. Le gouvernement a présenté le 29 septembre dernier un plan de 200 milliards d’euros pour aider les ménages et les entreprises allemands. Ce plan, qui comprend notamment des subventions pour limiter la hausse du prix du gaz, a créé la polémique en Europe : les pays européens craignent que les milliards donnés aux entreprises allemandes ne provoquent des distorsions de concurrence avec les entreprises de leurs pays. Ces pays ne disposant pas des mêmes capacités budgétaires pour aider leurs entreprises. Les Allemands, de leur côté, expliquent qu’ils sont l’un des pays les plus touchés par la crise énergétique. Un ménage sur deux se chauffe au gaz, et l’industrie, un des secteurs économiques les plus gourmands en énergie, représente une part importante de l’économie allemande — 22 % du PIB, contre 13 % en France. Une entreprise industrielle allemande sur dix aurait d’ailleurs réduit ou arrêté sa production en raison de la hausse du coût de l’énergie. L’inflation a atteint 8 % en Allemagne en 2022, et devrait se maintenir à 7 % en 2023.

À parcourir

La filière Label Rouge invente une nouvelle forme de téléréalité : pour rassurer les consommateurs sur les conditions d’élevage de ses poulets, la filière va filmer certains élevages 24 heures sur 24, et les diffuser sur un site internet accessible à tous. lesechos.fr

Découvrez comment Pretto, l’expert en ligne du crédit immobilier, a bénéficié d’un financement de Memo Bank après sa dernière levée de fonds. memo.bank/client-pretto

La démocratisation de l’accès à l’espace (grâce à la miniaturisation des systèmes embarqués et à la diminution des coûts de lancement de fusées) pourrait révolutionner de nombreux secteurs économiques, comme l’agriculture, l’énergie, l’assurance, ou encore la gestion d’actifs. mckinsey.com (article et podcast en anglais)

Le projet de loi de finances 2023 prévoit une baisse des impôts de production, souvent accusés de nuire à la compétitivité des entreprises françaises. C’est plus précisément la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises qui baissera en 2023, avant d’être supprimée définitivement en 2024. entreprises.gouv.fr

La grève ne touche pas seulement les raffineries mais aussi des centrales nucléaires d’EDF, ce qui perturbe les opérations de maintenance. lemonde.fr (article payant)

Le FMI a publié ses prévisions de croissance pour 2022 et 2023. La croissance économique mondiale, qui était de 6 % en 2021, ne sera que de 3,2 % en 2022, et de 2,7 % en 2023. C’est la plus faible progression depuis la crise financière de 2008 — hors crise du Covid. imf.org

Des chiffres

Le ralentissement des levées de fonds se poursuit au niveau mondial. Selon une étude trimestrielle de CB Insights, les levées de fonds ont diminué de 34 % au troisième trimestre de 2022, par rapport au troisième trimestre de 2021, avec 74,5 milliards de dollars levés. Cette baisse est la plus importante observée depuis 10 ans. Les entreprises américaines concentrent 49 % des montants levés, les entreprises asiatiques 27 %, et les entreprises européennes 20 %. Par ailleurs, le nombre de nouvelles licornes lors de ce trimestre a diminué de 71 % dans le monde.

Des lettres

« La politique est une pierre attachée au cou de la littérature, et qui, en moins de six mois, la submerge. La politique au milieu des intérêts d’imagination, c’est un coup de pistolet au milieu d’un concert. Ce bruit est déchirant sans être énergique. Il ne s’accorde avec le son d’aucun instrument. Cette politique va offenser mortellement une moitié des lecteurs, et ennuyer l’autre qui l’a trouvée bien autrement spéciale et énergique dans le journal du matin. »

Stendhal (1830). Le Rouge et le Noir.

À pourvoir

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Hadrien Léger

Rédacteur