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Fin du télétravail obligatoire dans les entreprises

Brice Boulesteix

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03 septembre 2021

La newsletter Memo Bank du 3 septembre 2021.

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À lire

Le télétravail n’est plus « obligatoire »

Si les protocoles sanitaires édités par le ministère du Travail étaient des produits technologiques, comme le navigateur Firefox ou le système d’exploitation iOS, alors nous pourrions dire que le ministère en est à sa quatrième version, sa version 4, ou v4. Après avoir mis en ligne une première version de son protocole le 9 juin dernier, le ministère vient de publier la quatrième édition de son document de référence. Pile à l’heure pour la rentrée. Au programme de cette mise à jour : la fin du télétravail obligatoire dans les entreprises, la fin du masque obligatoire dans les lieux soumis au passe sanitaire (à l’exception de certains trains), et la fin du contrôle systématique du passe sanitaire pour les salariés en mesure de prouver qu’ils sont vaccinés.

Si le passe sanitaire ne concerne « que » 1,8 million de salariés — ceux qui travaillent dans des établissements accueillant du public, comme les restaurants ou les musées —, la fin du télétravail obligatoire concerne quant à elle toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité. Bien que le ministère du Travail n’ait jamais vraiment disposé d’un arsenal juridique suffisant pour rendre le télétravail obligatoire dans les faits, ce mode d’organisation du travail était jusque-là fortement recommandé aux entreprises, puisqu’il permettait de lutter contre la propagation du Covid-19 en limitant les contacts entre salariés. À mesure que la vaccination de la population française avance, la nécessité d’isoler les employés les uns des autres se fait de moins en moins pressante. Dans ces conditions, le ministère du Travail semble prêt à laisser le volant aux dirigeants.

Et maintenant ? Et après ? Les dirigeants peuvent de nouveau organiser leur entreprise comme ils l’entendent, certes, mais que vont-ils décider ? Vont-ils entériner le travail « hybride » qu’ils ont été contraints de mettre en place durant les épisodes de confinement ? Ou vont-ils au contraire faire un rejet de greffe et tirer à jamais un trait sur le télétravail ? Pour le savoir, Bertrand Duperrin, le directeur des opérations de l’agence de communication Emakina, a épluché l’étude annuelle qu’IBM consacre aux CEO (chief executive officer). Que révèle l’étude d’IBM en matière de perception du télétravail chez les chefs d’entreprise ? L’étude montre que les patrons sont divisés sur la question. La fracture est nette. Dans les entreprises qui ont tiré leur épingle du jeu pendant la crise sanitaire, 50 % des dirigeants considèrent que le télétravail est un enjeu majeur, un sujet dont ils doivent s’emparer sans tarder. À l’inverse, dans les entreprises qui ont particulièrement souffert depuis le printemps 2020, seuls 25 % des patrons estiment que le télétravail est un sujet sérieux.

Sans grande surprise, les chefs d’entreprise qui ont subi le télétravail semblent ne plus vouloir y penser. Après tout, personne n’aime remâcher les souvenirs qui remuent les boyaux. De leur côté, les dirigeants qui ont surnagé grâce à la collaboration en ligne semblent disposés à pérenniser ce mode de travail dans leur société. Pourquoi arrêteraient-ils de jouer le jeu du télétravail, puisqu’ils y gagnent ? Deux salles, deux ambiances, donc. Charge aux dirigeants de prendre parti maintenant. À eux de se positionner sur le sujet. À eux d’organiser le travail comme ils l’entendent, selon leurs convictions, leurs principes, et leur capacité à lâcher prise pour laisser plus ou moins d’autonomie à leurs employés. Et qui dit fin du télétravail obligatoire dit surtout début des discussions délicates sur sa généralisation ou non dans les entreprises. En levant son obligation sur ce point, le ministère du Travail ne fait sans doute pas un cadeau à tout le monde.

Les aides de l’État ont renforcé certaines PME

Quand un ancien professeur de philologie du nom de Friedrich Nietzsche écrivit « ce qui ne me tue pas me fortifie », en 1888, ce dernier était sans doute loin de se douter que sa maxime finirait sur des tasses, des t-shirts, et dans des publications LinkedIn « inspirationnelles ». De la même manière, quand le gouvernement français a mis des dizaines de milliards d’euros sur la table en mars 2020, ce dernier ne pouvait pas prévoir qu’il allait renforcer les PME qu’il tentait avant tout de sauver. Pourtant, à en croire une récente étude menée par l’assureur Euler Hermes, les aides de l’État ont fait plus qu’empêcher certaines PME de mourir, elles ont renforcé bon nombre d’entre elles. D’après les chiffres publiés par l’assureur, la France compte aujourd’hui moins de PME susceptibles de faire faillite dans les quatre années qui viennent (13 %) qu’elle n’en comptait en 2019, avant la crise (14 %). Pour Euler Hermes, c’est le signe que les aides de l’État ont fait plus qu’amortir le choc économique provoqué par la crise sanitaire en 2020.

Comment les actuaires d’Euler Hermes font-ils pour savoir si une PME est susceptible de toucher le fond ? Pas en tirant les cartes, pas non plus en lisant dans des feuilles de thé, mais plutôt en tâchant de prédire le futur à la lumière du passé. Concrètement, les actuaires ont regardé si les entreprises qui avaient fait faillite ces dernières années avaient des traits en commun. Ils ont ensuite mesuré la part d’entreprises en activité qui possédaient elles aussi ces fameux traits. Si une entreprise en activité a le même profil qu’une entreprise qui a récemment fait faillite, les auteurs de l’étude en déduisent que l’activité de l’entreprise en question pourrait s’effondrer dans les quatre années qui viennent. Quels sont les indicateurs retenus par les auteurs  ? Il y en a trois :

  1. La profitabilité, c’est-à-dire la facilité avec laquelle une entreprise dégage un excédent à partir de son activité.
  2. La valeur de l’entreprise, c’est-à-dire la valeur de ses actifs, qu’il s’agisse de capitaux propres (ses réserves) ou de dettes (ses crédits).
  3. Le ratio de couverture des intérêts, c’est-à-dire la capacité d’une entreprise à créer des excédents de trésorerie pour payer les intérêts de ses crédits.

Les performances passées ne préjugent pas des performances futures, certes, mais quand la profitabilité d’une entreprise tend vers zéro, quand sa valeur baisse, et quand les revenus issus de ses activités ne lui permettent plus de payer ses intérêts, la fin est généralement proche. C’est ce qui fait dire à Euler Hermes que les entreprises chez qui ces trois indicateurs virent au rouge ont de fortes chances de défaillir dans les années qui viennent. En France, toujours d’après l’étude, les PME fragiles sont particulièrement nombreuses dans les secteurs de l’automobile, de l’énergie, et du transport. Plus rassurant, il semblerait que les PME françaises aient renforcé leur trésorerie en 2020, par rapport à 2019, ce qui signifierait que le prêt garanti par l’État (PGE) a joué son rôle de « crédit de trésorerie exceptionnel ».

Enfin, alors que l’endettement des PME françaises a fortement augmenté en 2020, leur ratio de couverture des intérêts n’a pas basculé du côté obscur, lui. Et pour cause : les PME françaises ont eu accès aux taux d’intérêt les plus bas des pays de la zone euro — en juillet 2021, une entreprise peut emprunter un million d’euros à 1,3 %. De quoi apporter de l’eau au moulin des banques françaises, qui prétendent avoir rogné sur leurs marges en 2020 pour voler au secours des entreprises dont la trésorerie battait de l’aile. Est-ce à dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles ? Non, loin s’en faut. En regardant à travers leur boule de cristal, Euler Hermes estime que 13 % des PME françaises pourraient mettre la clé sous la porte d’ici 2025. Un chiffre certes en dessous de ce qu’il aurait pu être sans intervention de l’État (17 %), mais un chiffre préoccupant tout de même.

À parcourir

Dans la série « financements alternatifs », un couple a récemment trouvé 239 pièces d’or dans le manoir breton qu’il était en train de restaurer. Les pièces dormaient depuis plus de 300 ans dans un vieux mur en pierre, à l’abri des jaloux. Valeur du trésor : 250 000 € à 300 000 €. sudouest.fr

Contrairement au vin, la plupart des systèmes informatiques ne se bonifient pas en vieillissant. Les banques sont bien placées pour le savoir. Hélas, plaquer des interfaces modernes sur des programmes conçus au siècle dernier ne permet pas de faire l’économie d’une vraie transformation numérique. cestpasmonidee.blogspot.com

Si la formule « transformation numérique » vous évoque autant de choses que les rapports entre l’élan dionysiaque et l’élan apollinien dans la tragédie antique, c’est le moment de relire notre introduction sur le sujet. memo.bank/magazine

Le changement climatique peut-il provoquer une crise financière ? Possible, répond The Economist, mais pas sûr pour autant. Tout dépendra de la vitesse à laquelle les banques cesseront de financer certains secteurs. Plus cette transition sera brutale, et plus il y aura de dégâts. economist.com (article payant et en anglais)

Si vous vous posez la question, oui, le port du masque reste fortement recommandé dans les bureaux ouverts (open spaces), même pour les salariés vaccinés — à moins que vos employés ne soient soumis au passe sanitaire, auquel cas les personnes vaccinées sont dispensées de masque (sous conditions). travail-emploi.gouv.fr

Certaines entreprises manquent d’employés qualifiés, d’autres manquent de dérailleurs. La PME Cyfac, qui fabrique les cycles Méral, des vélos haut de gamme sur lesquels ont roulé Laurent Fignon et Luc Leblanc, peine à répondre aux demandes de ses clients, faute de composants. lesechos.fr

Des chiffres

41,6 millions de Français achètent sur Internet, un chiffre en hausse de 1,5 million par rapport à 2019. C’est ce qui ressort du rapport annuel de la fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD). Nous sommes loin de l’époque où jouer à la roulette russe semblait moins risqué que faire un achat en ligne.

Des lettres

« Appris à l’École de Guerre de la vie : ce qui ne me tue pas me fortifie. »

— Friedrich Nietzsche (1888). Crépuscule des idoles.

À pourvoir

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Brice Boulesteix

Rédacteur